Il meurt lentement – Pablo Neruda

Ces textes que j’aurais voulu écrire. Ceux qui parlent à mon âme. Ceux qui ont su exprimer des émotions indicibles. Je suis persuadée qu’ils constituent une trame qui, mise bout à bout, compose un peu de notre univers. Un tissu doux et soyeux qui nous entoure et nous protège. La source de notre propre pouvoir de création.

Il meurt lentement
celui qui ne voyage pas,
celui qui ne lit pas,
celui qui n’écoute pas de musique,
celui qui ne sait pas trouver
grâce à ses yeux.

Il meurt lentement
celui qui détruit son amour-propre,
celui qui ne se laisse jamais aider.

Il meurt lentement
celui qui devient esclave de l’habitude
refaisant tous les jours les mêmes chemins,
celui qui ne change jamais de repère,
Ne se risque jamais à changer la couleur
de ses vêtements
Ou qui ne parle jamais à un inconnu

Il meurt lentement
celui qui évite la passion
et son tourbillon d’émotions
celles qui redonnent la lumière dans les yeux
et réparent les cœurs blessés

Il meurt lentement
celui qui ne change pas de cap
lorsqu’il est malheureux
au travail ou en amour,
celui qui ne prend pas de risques
pour réaliser ses rêves,
celui qui, pas une seule fois dans sa vie,
n’a fui les conseils sensés.

Vis maintenant!
Risque-toi aujourd’hui !
Agis tout de suite !
Ne te laisse pas mourir lentement !
Ne te prive pas d’être heureux !

« La cloche de détresse » – Sylvia Plath

*** UN BON MOMENT DE LECTURE

Depuis que je m’intéresse au féminisme et à la poésie, j’entends parler de Sylvia Plath partout. Elle constitue apparemment l’une des figures emblématique des poétesses américaines et le fait que des gens que j’admire la cite comme une source d’inspiration m’a beaucoup intrigué. J’ai commandé un recueil de poèmes, The collected Poems, qui se sont avérés malheureusement un peu trop pointus pour que je puisse en savourer la teneur avec mon niveau d’anglais. J’ai donc décidé de me rabattre sur le seul roman qu’elle ait écrit, et qui, lui, a été traduit, c’est La cloche de détresse, « The Bell Jar » dans son titre original.

SYNOPSIS : Esther Greenwood, jeune fille brillante et passionnée de littérature est tout d’abord accueillie à bras ouverts par le monde académique et par celui des média, reconnue pour ses talents d’écriture. Mais la reconnaissance n’est jamais unanime et elle finit par recevoir un refus pour un stage d’été en écriture sur lequel elle avait mis tous ces espoirs. On la suit alors dans une descente psychologique au cours de laquelle elle se retrouve désormais en proie à toutes ses insécurités qui, jusque-là, l’avaient épargnées.

CE QUE J’AI AIME :
– L’expression de la souffrance psychologique : Esther ne souffre pas d’un événement en particulier, mais plutôt d’être trop exigeante avec elle-même. Ce n’est pas qu’elle n’a pas de talent, mais plutôt qu’elle-même se juge et se condamne. Une ambivalence de l’écrivain qui me touche et qui doit certainement résonner avec nombre d’artistes.
– Le niveau d’intimité : Esther est envoyée dans un asile et, en tant que lectrice, j’ai eu le sentiment d’être enfermée avec elle. J’ai partagé sa fébrilité, ses interrogations. J’ai ressenti une grande proximité avec elle. L’autrice parvient a nous faire partager la dépression d’Esther sans pour autant nous y faire plonger, c’est pour moi un vrai tour de force.
– L’humour tenté d’ironie de l’auteur : le suicide est une thématique qui prend beaucoup de place dans le récit. L’autrice parvient à rendre le sujet supportable en le mettant à distance avec une attitude pragmatique qui rend la perspective un peu absurde. L’humour comme barrage contre la douleur, mais au final, c’est aussi le meilleur moyen d’exprimer de la pudeur vis-à-vis d’une souffrance trop bouleversante, aussi bien pour l’autrice que pour la lectrice que je suis.

CE QUE J’AI MOINS AIME:
– L’ambiance dépressive : ce n’est un secret pour personne, Sylvia Plath s’est suicidée à l’âge de 30 ans suite à une vie profondément marquée par la dépression. J’avoue que je ne suis pas fan des ambiances trop plombantes. Mais la sensibilité avec laquelle l’autrice s’exprime rend son histoire touchante malgré tout.
– Le manque d’histoire. Au final, ce livre se rapproche plus d’une auto-fiction que d’un véritable roman. Et je l’apprécie mieux en le considérant sous cet angle autobiographique. J’en suis néanmoins ressortie un peu sur ma faim en terme de structure narrative. Mais j’imagine que cela correspond bien à la déroute dans laquelle le personnage d’Esther se retrouve, sans perspective, justement. Cela génère une impression de malaise, qui sert le propos, mais qui m’a pas mal frustré.

EN TANT QU’ÉCRIVAINE
Ma curiosité envers l’univers de Sylvia Plath et ma réaction à la lecture de ce roman me montre qu’une part de moi est touchée par l’expression de la souffrance psychologique que je ne m’autorise absolument pas dans mes écrits à ce jour. C’est sans aucun doute une piste d’exploration intéressante pour moi. Elle passera, je pense, par une écriture plus proche de la poésie, même si j’avoue que c’est un genre d’écriture que je trouve intimidant.

ET APRÈS ?
Une écriture fluide qui se lit très facilement. Une bonne façon d’entrer dans l’univers de cette autrice dont les tourments psychologiques et l’œuvre ne font qu’un. On touche ici au thème de la transcendance qui est l’un de mes sujets de prédilection. Cela ma donne donc l’envie de continuer d’explorer l’œuvre de cette autrice, et « La cloche de détresse » m’a semblé constituer une bonne porte d’entrée pour commencer à faire sa connaissance. Dans ma liste de prochaines lectures figurent donc maintenant en bonne place ses Journaux (1950-1962), parus en 1999 chez Gallimard.

Et vous, connaissiez-vous cette autrice ? Qu’en avez-vous pensé ?

Recommencer

Empêchée, enchaînée dans les liens du Passé.
Trop loyale, trop soucieuse d’être aimée,
Trop prompte à m’oublier, à me laisser absorber.
Par lui, par elle, par toute personne qui m’aime.
Je suis à toi, je ne m’appartiens déjà plus.
Je me perdais dans tes bras et je n’en ai rien su.

Depuis ton départ, j’apprends à renaître.
J’apprends à respirer, à vivre par moi-même.
Jusqu’à la prochaine rencontre.
Je la redoute, je l’appelle de mes vœux.
Mon cœur s’emballe à l’idée de vibrer à nouveau,
De sentir les ailes d’un autre me frôler, de toucher sa peau.

J’aurais pu t’aimer, je n’en ai rien fait.
J’ai préféré prétendre, faire comme si.
J’ai préféré passer le reste de mes jours à t’attendre, à bousiller ma vie.
Mais il n’est pas trop tard, je veux encore y croire.
Me coucher dans mon lit avec cet espoir.
Ouvrir un œil curieux aux premières lumières de l’aube,
Et sentir la vie, peu à peu, revenir…

- fA170820