Un trésor de famille – Episode 6


Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Mégane suit le vieil Archibald dans l’escalier de pierre. Elle est presque obligée de se coller à lui pour rester dans la lumière de son chandelier. Sans ses amis à ses côtés, Mégane se sent particulièrement vulnérable et elle est de plus en plus inquiète. Chaque recoin pourrait abriter des dangers inconnus et il lui semble percevoir des chuchotements, des murmures, qui se taisent lorsqu’elle s’arrête pour tenter de les écouter plus attentivement.
– Ne traîne pas, petite, il est facile de se perdre dans les dédales de la Tour.
Après plusieurs étages, Archie ralentit enfin, pousse une lourde porte en bois et l’invite à entrer. L’accueil de la pièce lui apparaît d’emblée beaucoup plus chaleureux que tous les endroits qu’elle a pu traverser depuis son arrivée. Un gigantesque feu de cheminée crépite dans le centre de la pièce, de grandes draperies de velours rouges réchauffent agréablement l’espace et une bibliothèque monumentale recouvre les murs, du sol au plafond, sur une grande partie de la pièce. Le vieil Archibald semble satisfait du silence impressionné de son invitée.
– Tu apprécies le confort de mon humble demeure ?
Mégane ne répond rien, elle s’approche des livres les plus proches pour en déchiffrer les tranches. « Le grand livre de la Magie », « Histoires lugubres et autres contes », chaque titre lui révèle un univers mystérieux et fascinant. Mégane ne parvient plus à détacher ses yeux de tous ces livres magnifiques dont la plupart ont des couvertures précieuses. Archibald lui propose aimablement un chocolat et s’absente un instant de la pièce, le temps de sa préparation.

En l’attendant, Mégane poursuit son exploration, et s’apprête à se saisir de « l’Encyclopédie des Créatures magiques » lorsqu’un objet inconnu lui tombe douloureusement sur la tête. Elle le ramasse à la hâte et découvre avec stupeur le roman disparu de la bibliothèque de sa Grand-mère.
– L’île au trésor de Stevenson, c’est bien l’ouvrage que tu cherchais ?
Mégane lève la tête vers Hector qui se promène avec agilité sur les étagères pourtant encombrées de livres et de menus objets.
– Je ne vois pas en quoi cela te concerne !
– Prends-le avant qu’Archie ne revienne. Il ne t’autorisera jamais à le récupérer.
Mégane n’a pas le temps de répliquer, car Archibald revient dans la pièce, les bras chargés d’un plateau dégageant une merveilleuse odeur de chocolat. Sans réfléchir, elle enfouit le petit livre dans sa poche de sweat-shirt.

– Mégane, assieds toi. Dit-il en lui désignant un fauteuil face à lui.
Elle s’exécute, nerveuse à nouveau.
– Je ne vais pas y aller par quatre-chemins. Toi et tes amis, vous ne pouvez pas retourner chez ta Grand-mère sans mon aide, et moi, j’ai besoin de toi pour me ramener un objet qui m’appartient.
– Un objet ? Quel objet ?
– C’est une plume, une plume pour écrire. Elle était le clou de ma collection, et on me l’a volé. Je veux absolument la récupérer. Tiens, je t’ai préparé une carte pour te guider directement à l’emplacement ou elle a été mise en réserve.
– Si vous savez où elle est, pourquoi n’allez-vous pas la chercher vous-même ?
– Et bien, pour des raisons qui seraient trop compliquées à t’expliquer, cette plume se trouve maintenant dans un autre monde, dans lequel je ne suis pas le bienvenu.
– Un autre monde que celui-ci ? Mon monde ?
– Non, un monde principalement peuplé d’esprits. Ce sont eux, qui gardent ma précieuse plume. Et je sais qu’une âme pure, comme la tienne, n’aura aucun mal à se faufiler parmi eux, pour la retrouver.
– Vous voulez que j’aille dans le monde des esprits ? Mais qu’est-ce qui vous dit que je vais réussir ? Et puis comment je vais accéder à ce monde ?
– Je t’avoue que je n’ai aucune garantie, mais tu es ma seule chance d’y parvenir, comme je suis ta seule chance de retour chez toi. CA se tente !
– Mais je…. Ahhhh… Je ne me sens pas très bien.
– Oui, c’est normal, tu es déjà en partance pour le monde des esprits. J’ai versé l’élixir nécessaire dans ton chocolat, des fois que tu refuses de l’avaler de ton plein gré. C’est le seul moyen d’accéder à ce monde, mais son effet est limité dans le temps et ne peut être utilisé qu’une fois. Presse-toi, sinon toi et tes amis resterez dans mes cachots pour le restant de vos jours.
– Arghhhh…. J’ai si mal au ventre ! J’ai chaud… Je…
Mégane est pliée de douleur, elle a la tête qui tourne, sa respiration s’accélère, elle a l’impression de devenir complètement folle.
– Hector, NON !!
Alors que la pauvre Mégane s’effondre dans son fauteuil, Hector surprend son Maitre en atterrissant avec souplesse sur la table basse, pour lécher le restant de chocolat, laissé par Mégane.
– Hector, mais qu’est-ce que tu fais ? Tu sais que pour toi l’effet sera irréversible !
Mais Hector continue de laper le fond de la tasse, puis il se traîne péniblement sur les genoux de Mégane, avant de s’évanouir à son tour.

La suite, la semaine prochaine…

UPDATE: la suite ICI.

Un trésor de famille – Episode 5

Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Les trois acolytes se retrouvent à nouveau devant la porte de l’armoire, mais celle-ci est complètement inerte. Mégane et Pélops sont perplexes.
– Tu es sûr que l’armoire « fonctionne »?
– Il n’y a aucun doute là dessus. Si tu sais où est la clé, bien sûr. Sans elle, nous ne pouvons rien faire.
Mégane sort discrètement la clé de sa cachette et la brandit devant Hector en s’approchant pour l’introduire dans la serrure.
– Attends. Cette clé est TRÈS importante, car sans elle, nous ne pourrons pas revenir dans ce monde. Tu as un moyen de t’assurer de ne pas la perdre ?
Mégane réfléchit et s’absente un instant dans le salon. Pélopidas et Hector l’entendent déplacer des objets et elle revient quelques minutes plus tard avec un grand ruban de satin, trouvé dans la boite à couture de sa Grand-mère.
– Voilà, je suis prête.
Elle s’avance vers eux, la clé maintenant accrochée en pendentif autour de son cou, grâce au joli ruban.
– Bien joué petite, maintenant préparez vous à une belle envolée !
Suivant les indications d’Hector, Mégane s’approche de l’armoire et tourne la clé.

La lumière aveuglante réapparaît aussitôt, l’armoire entière semble prendre vie, et Mégane a juste le temps de sortir la clé de la serrure qu’elle est aspirée, avec Pélops et Hector, à l’intérieur. S’en suit une chute vertigineuse, dans un espace qui ne semble n’avoir aucune limite. Les trois amis sont secoués dans tous les sens, et traversent successivement des strates de couleurs éblouissantes dans laquelle la densité de l’air semble différente. Des sensations étranges la parcourent à chaque changement de couleur. Mégane en a le souffle coupé et se sent complètement désorientée lorsque son corps heurte violemment le sol dur d’une pièce plongée dans le noir. Quelque peu sonnée, elle met un certain temps a retrouver ses esprits. Et ce n’est qu’au bout d’une bonne minute, qu’elle parvient à se relever en tâtonnant.
– Pélops ? Hector ? Vous êtes là?
– Je suis là répond Pélopidas d’une voix lointaine.
– Mégane ?
– Sophie !! Où êtes-vous tous les deux, je vous entends, mais je ne vous vois pas?
– Je suis dans une sorte de chambre, pas trop loin de vous, j’imagine. Ah que je suis contente de vous entendre ! Vous en avez mis du temps à arriver. J’ai cru que jamais vous ne me retrouveriez.
– Oh Sophie, j’ai eu tellement peur pour toi !
Les yeux de Mégane se sont maintenant suffisamment acclimatés à l’obscurité pour apercevoir la silhouette agile d’Hector se faufiler à travers des barreaux et détaler vers les marches d’un grand escalier en colimaçon. Manifestement, Pélops l’a également aperçu :
– Quel traître. Je savais que l’on ne pouvait pas faire confiance à ce chat de malheur !
Mégane est désemparée, elle ne répond rien, elle regarde autour d’elle et distingue maintenant une sorte de cachot moyenâgeux. Les murs et le sol sont recouverts d’une pierre froide et luisante. Et un lit à baldaquin, seul meuble à l’horizon, trône au milieu de la pièce. D’un coté, une fenêtre très étroite laisse rentrer un faible rayon de lumière, tandis que de l’autre coté, une grille en fer forgé relie le sol au plafond.
– Nous sommes enfermés. En prison. Ah Hector nous a bien eus !
– J’avoue que je ne m’attendais pas à ça…
Mais leur conversation est rapidement interrompue, car des pas inquiétants se font entendre, provenant de l’escalier. Les trois amis se taisent, tous leurs sens aux aguets. Leurs yeux se tournent avec appréhension vers les marches qui se dessinent dans la pénombre.

Au bout de quelques minutes, une silhouette noueuse se dessine dans la lumière d’un chandelier, porté à bout de bras.
– Tiens, tiens, tiens, mais oui, ce sale chat ne m’a pas menti, c’est bien une petite fille que je vois là.
– Qui êtes-vous ? Libérez-nous, nous sommes arrivés ici par erreur ! Tente vaillamment Mégane pour conjurer sa peur.
– Une erreur ? Je ne crois pas, non. J’attends votre venue depuis longtemps. L’arrivée de la poupée était un bon présage, je me suis doutée que les choses étaient en train de tourner en ma faveur. Tu es la petite fille de la vieille Hazel, j’imagine.
– Je ne comprends pas, de quoi parlez vous ?
– Tu es la petite fille de la vieille Hazel, j’imagine. Comme t’appelles-tu ?
– Je suis Mégane. Et vous ?
– Je m’appelle Archibald, mais tu peux m’appeller Archie. J’imagine que si tu es ici, c’est que tu as entendu parlé du Trésor?
– Je ne suis pas sure…
– Ahahah, inutile de me mentir, grande fille. Allez, Viens maintenant, nous n’avons pas de temps à perdre. Si tu veux un jour revoir ta Grand-mère et le monde dans lequel tu vis, tu n’as d’autre choix que de me suivre. J’ai une proposition à te faire, une opportunité que tu n’auras qu’une fois dans ta vie !

UPDATE: La suite, c’est ici !

Un trésor de famille – épisode 4

Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Mégane reste muette devant le chocolat chaud que sa Grand-mère vient de lui préparer pour son petit-déjeuner. Les yeux dans le vague, elle ne sait plus que penser de la nuit qui vient de se dérouler. D’un côté, le fait qu’elle se soit endormi dans le fauteuil, sans s’en apercevoir, explique parfaitement comment Sophie et Pélops se sont subitement mis à lui parler et l’armoire à s’agiter toute seule. Cela semble logique, tout cela n’était qu’un rêve. D’un autre côté, comment expliquer qu’elle aie trouvé Pelops précisément à l’endroit ou elle l’avait laissé juste avant son réveil? Et surtout, où est passée Sophie ? Au matin, quand Mégane avait arraché la clé de l’armoire aux griffes d’Hector in extremis, elle s’était immédiatement mise en recherche de sa poupée. L’armoire ne contenait plus que l’habituel amas de manteaux suspendus, mais aucune trace de Sophie. Ni dans la penderie, ni dans sa chambre, Mégane en avait fait le tour, plusieurs fois.
– Qu’est-ce qu’il t’arrive ce matin Mégane ? Tu m’as l’air bien pensive.
– C’est Sophie, Grand-mère, elle a disparu, je ne la trouve nulle part.
– Oh, ne t’inquiète pas, elle va réapparaître. Peut-être l’as-tu laissé tomber cette nuit dans ton sommeil? Je ne savais pas que tu avais des crises de somnambulisme.
– Des crises de quoi ?
– « Somnambulisme », c’est quand les personnes se lèvent de leur lit et font des choses alors qu’elles sont toujours endormies. J’ai l’impression que c’est ce qu’il t’est arrivé cette nuit.
Mégane se tait. Elle n’a pas tout raconté à sa Grand-mère. Seulement qu’elle ne se souvenait pas s’être endormie dans le salon. Et ces crises dont elle parle, sont loin de tout expliquer. Tout à coup, l’horreur de la situation la rattrape : elle a perdu Sophie. Ce constat lui est insupportable. Des larmes coulent malgré elle sur ses joues, et elle ne peut s’empêcher d’éclater en sanglots.
– Allons Mégane, ne pleure pas ma chérie. On va chercher ta poupée ensemble, et je suis certaine que nous allons la retrouver. En attendant, que dirais-tu si nous faisions des crêpes pour le déjeuner aujourd’hui ? Ça te plairait ?

Faire la cuisine est l’une des activités préférées de sa Grand-mère et un plaisir qu’elles partagent. Mégane aime par dessus tout faire de la pâtisserie, et cette proposition lui fait un peu oublier sa tristesse. Ses yeux pétillent à nouveau. Grand-mère est ravie d’avoir trouvé un moyen de remonter le moral de sa petite-fille. Mégane sèche ses larmes, pendant que sa Grand-mère sort toute sortes d’ingrédients, et en quelques minutes, la cuisine est transformée en champs de bataille. Après avoir englouti les crêpes, les deux acolytes se lancent dans la confection de muffins au chocolat. Ce sont les gâteaux préférés de Mégane, et elle est très fière d’en connaître la recette et de pouvoir anticiper les directives de sa Grand-mère. Sans qu’elle en prenne trop garde, la journée passe à une vitesse hallucinante. La maison est parfumée de cette délicieuse odeur de gâteaux fraîchement sortis du four, et le visage de Mégane est barbouillé de chocolat.
– Tu crois que tu auras encore faim pour le diner ?
Mégane ne sourit plus. C’est déjà la fin d’après-midi et elles n’ont pas cherché Sophie. L’angoisse la reprend et sa Grand-mère s’en rend compte. Elles passent une bonne heure à retourner la maison, sans succès.
– Je suis désolée ma puce. Tu n’as qu’à dormir avec Pélopidas ce soir, et dés demain matin, on se remet à sa recherche. OK ?

Mégane est désespérée. Elle se couche la mort dans l’âme, et tourne, retourne dans son lit, sans parvenir à s’endormir. La maison a retrouvé le calme de la nuit lorsqu’une voix inconnue lui fait ouvrir les yeux précipitamment.
– Bon, si tu veux retrouver ta précieuse amie, je crois que tu as intérêt à te bouger !
Mégane, allume sa lampe de chevet, le cœur battant, pour découvrir Hector, tranquillement assis au pied de son lit, ses yeux jaunes braqués sur elle.
– Tu… Tu sais où elle est?
– Mais toi aussi ma belle ! Tu l’as vu comme moi disparaître dans l’armoire. Je suis désolée, mais je n’ai pas de meilleure nouvelle. Il va falloir y retourner.
Pélops s’agite aux côtés de Mégane.
– Tu es certaine qu’on peut lui faire confiance ?
Hector se lèche nonchalamment une patte avant, en ricanant.
– Ce que tu peux être cliché mon pauvre ami. On peut jouer un autre scénario que cette bataille puérile entre chiens et chats ?
Pélops ne répond rien, mais ce chat ne lui dit vraiment rien qui vaille. Mégane se lève, enfile un jogging et un sweat-shirt.
– Je crois que nous n’avons pas le choix Pélops, suivons Hector…

La suite au prochain épisode, la semaine prochaine. <3

Update: Vous trouverez la suite de l’histoire ICI.